Toujours la presentation aussi soignée que la parole bien articulée. Abira Bonfoh fait de la courtoisie sa marque d’éducation. Cette étiquette lui colle à la peau, comme un gant. Dans les allées de l’Assemblée nationale du Togo, la brise de ce mois de mai berce le visiteur. Sous la verrue dorée de la chambre législative, des hôtes patientent dans la salle d’attente feutrée de la Première questeure. La réunion du Bureau de la représentation nationale bouscule son agenda. Au final, voilà l’élue. Abira Bonfoh ouvre la porte, affiche un léger sourire et rassure. Place à l’entretien. À la question de savoir son incitation à s’engager dans la vie politique, elle fait une pause et se pose au bout du fauteuil. L’élocution et le verbe restent contrôlés. Son visage rayonne et s’illumine. Elle résume l’essence de sa mission, avec émotion. “Je me suis mise à la disposition du pays, des électeurs, de la jeunesse”. L’engagement politique de l’élue de Bassar affecte parfois son agenda familial. En des circonstances, elle est contrainte à se soustraire à ses obligations privées. Nonobstant ces renoncements, elle maintient le cap. “En cela je tempère en disant que ma famille et moi, nous passons après le pays”. Elle renchérit : “je pourrais dire que mon devoir pour le Togo est plus grand en matière d’impact”. Savoir-être strict et figure parfaite d’élue, sa vocation au service du peuple est aussi administrative. Titulaire de la questure de l’Assemblée nationale et Personne responsable des marchés publics, ces charges lui imposent davantage bien de restrictions. “Je ne suis pas tributaire de mon agenda” reconnaît l’élue qui doit constamment arbitrer entre son rôle de mère et d’élue. Et, c’est le dernier qui prime. Et la famille se sent parfois délaissée. “Mais la vie est un choix”, concède t-elle philosophiquement. “Je me suis mise à la disposition du pays, des électeurs, de la jeunesse” Retour aux sources. C’est justement cet arbitrage qui l’a poussée à revenir s’installer au Togo, après deux décennies passées en Europe. “Personne ne peut se soustraire à son appartenance”, aime-t-elle asséner, pour expliquer les ambitions intimes de son retour au Togo. Dans la même veine, elle fait sien le proverbe qui dit : “Il n’y a pas pire étranger que celui qui revient”. S’il faudrait défaire les liens culturels d’ailleurs, il urge tout de même de s’en nourrir pour innover et jeter des passerelles. Ce faisant, le retour s’offre aussi comme un tremplin pour participer au développement avec d’autres recettes. Du reste, les fruits portent déjà la promesse des fleurs pour Abira Bonfoh. Cette diplômée en Banque et Finance se révèle aussi une femme d’affaires chevronnée, à la tête de plusieurs entreprises. Sa gamme d’expertise s’étale de l’ingénierie financière à la passation des marchés publics et pétroliers. Membre du réseau “Women Working for Change”, elle préside parallèlement la Chambre de commerce bilatérale Togo-République démocratique du Congo (CCT-RDC). C’est une dynamique semblable qui propulse les actions de la Fondation Asaal “douceur” en Touareg, dont elle est la fondatrice. Elle irrigue les plus fragiles en ressources… et en sources de motivation. Depuis 2014, la structure sème de petits grains pour accompagner le parrainage d’élèves, l’autonomisation de la femme, des projets culturels, des initiatives de jeunes et surtout la Reine des Sciences et Technologies : destinée à “décomplexer la jeune fille et l’ouvrir au monde”, selon Abira Bonfoh. En outre, elle promeut African Women Actions (AWA) qui vise la promotion et l’épanouissement au féminin. Cet apostolat social dont les graines ne cessent de fleurir fait voguer Abira Bonfoh sur les eaux de sa passion. Elle s’affiche davantage comme une vigie de la cause féminine. Au service de l’intérêt général. Les moteurs de cette dynamique l’ont conduite dans le champ politique. En 2018, les électeurs du Bassar, au Nord-Ouest du pays, lui donnent le mandat de députée de sa ville natale. “À travers l’action législative, les Togolais sont bénéficiaires des politiques publiques portées par l’Assemblée nationale dans l’intérêt général”, analyse-t-elle. Pour ce faire, elle s’octroie le “devoir de donner le maximum au pays, de renouveler cet engagement au quotidien”. De plus, c’est grâce aux petites interactions quotidiennes, par le biais des réseaux sociaux ou des rencontres avec le citoyen lambda, comme les élites qu’elle puise son inspiration pour carburer. “À travers l’action législative, les Togolais sont bénéficiaires des politiques publiques portées par l’Assemblée nationale dans l’intérêt général” Abira Bonfoh jouit d’une bonne réputation dans l’organisation et le travail. Cette rigueur s’est forgée dans le cercle familial. Il ne peut en être autrement pour la fille d’un officier qui a gravi toutes les hautes marches du commandement militaire. Des années plus tard, elle continue de se mirer dans les mirettes de ses proches. “Je chéris les moments en famille, le bonheur d’être aimée et d’aimer aussi, le bonheur d’être admirée par ses proches et d’admirer ses proches”, poétise l’élue. La cuisine, le jardinage, la lecture, la natation, les randonnées équestres avec ses deux chevaux complètent ce tableau des passions qui nourrissent sa joie de vivre. En explorant les regrets de cet engagement politique, l’on se rend compte que l’honorable de Bassar reste constante. “Je dirai plutôt gêne” s’empresse-t-elle d’observer. “Je mettrai l’emphase sur la famille. Mon fils avait besoin de moi, malheureusement j’étais prise pour une fonction et j’ai eu de la gêne. Lorsqu’on regarde dans les yeux de son enfant et voit sa peine parce que sa maman est indisponible pour l’assister dans sa représentation à l’école, en tant que mère, l’on a aussi de la peine. Mais, je suis plus rassurée par l’impact aussi plus grand des actions de la Fondation Asaal que de mon engagement politique”. Et pour finir, cette note reste majorée par la satisfaction de l’élue. “C’est de savoir que l’on se lève le matin, que l’on conjecture à quelque chose de grand, que l’on soit utile à ses concitoyens. Cela, c’est une bénédiction de tous les jours, c’est cela qui me satisfait”. La gratitude, des bénéficiaires des projets qu’elle porte, renforce cette félicité personnelle. Emouvant et passionnant. Abira